ELECTIONS CMCAS 2021
Comme vous le savez, les élections des conseils d’administration des CMCAS se tiendront du 18 au 23 novembre.
Les CMCAS, qui gèrent les activités sociales et culturelles pour les salariés, sont une spécificité des industries Electriques et Gazières puisque dans le régime général, elles sont gérées par les CSE (Comités Sociaux et Economiques).
D’abord un peu d’histoire…
Depuis 1946, le comité d’entreprise d’EDF est le Comité d’Entreprise (CE) le plus riche de France. Marcel Paul, soutenu par la puissance de la classe ouvrière au sortir de la guerre et le rapport de force qu’elle a su imposer, a réussi à obtenir que ce soit 1% du chiffre d’affaires qui soit versé par les employeurs aux gestionnaires des œuvres sociales des IEG, bien au-delà du financement moyen des entreprises, qui n’est pas imposé par la loi[1] contrairement au budget du CSE et se situe en moyenne autour de 1% de la masse salariale brute. Rappelons aussi qu’à l’époque, ce 1% « exceptionnel » venait comme contrepartie sociale au 1% versé, à titre d’indemnisation pour une durée de 50 ans, aux propriétaires des entreprises privées qui venaient d’être nationalisées.
Depuis 2017, le financement à hauteur de 1% est abrogé et remplacé par une formule de calcul opaque[2], conduisant à une forte diminution de son budget. De plus, de nombreuses entreprises du secteur (fournisseurs notamment) apparues avec l’ouverture des marchés ne contribuent pas à ce budget, en dépit du statut des Industries Electriques et Gazières (cf. art 25). Le financement par les employeurs des CMCAS a ainsi chuté de 500 à 400 millions d’euros depuis 2017 !
Ne pas céder à l’individualisme,
Défendre la CCAS pour ce qu’elle doit être
La CCAS est un acquis social important, un outil de redistribution des richesses, un moyen d’accès à la culture et aux vacances pour tous les salariés et leurs familles. Elle est durement attaquée par le gouvernement et par nos directions depuis plusieurs années, et doit être défendue !
Mais la CCAS n’appartient à aucune organisation syndicale. Elle n’appartient pas à ses gestionnaires. Elle n’a pas vocation à être politisée. La CCAS appartient à tous ses bénéficiaires, quelle que soit leur sensibilité syndicale ou politique. Elle doit être au service des salariés, des familles, sans imposer une quelconque idéologie.
Pour SUD Energie, recevoir des centaines de millions d’euros chaque année des patrons représente un piège gigantesque pour le syndicalisme, et n’est pas sans conséquence sur les évolutions sociales de l’entreprise. L’humain est faillible, et pour certains, il est parfois tentant de se livrer à quelques menues fraudes – le procès dit de la CCAS jugé en 2014 après 12 ans d’instruction, en est hélas le meilleur exemple[3]. Il est alors facile pour le patron d’utiliser de manière pragmatique son droit de regard, utilisant les éventuels comportements litigieux qu’il pourrait constater pour faire pression et obtenir du syndicalisme quelques signatures incompréhensibles sur des accords pourtant synonymes de régression économique ou sociale, ou faire cesser des mouvements sociaux pourtant essentiels à la défense du service public et des salariés.
Pire, en gérant ces sommes colossales, tout gestionnaire se transforme lui-même en patron, avec des centaines voire des milliers d’emplois à manager, des lieux à acheter, à louer, à revendre ou à entretenir… en un mot, avec une structure à faire vivre « coûte que coûte », parfois au prix de frais de fonctionnement interne exorbitants. Un tel mode de fonctionnement peut hélas finir par l’emporter sur le but réel des œuvres sociales qui doit être avant tout de contrebalancer les inégalités sociales pour proposer un lieu de contre-culture populaire d’où doit émerger l’espoir et la concrétisation d’un autre monde possible.
C’est pourquoi SUD Energie appelle de ses vœux la création de SCOPs de salariés, associations ou autres, de manière à séparer pour de bon l’activité syndicale (qui doit veiller aux droits des travailleurs) de cette activité d’œuvre sociale qui doit se concentrer sur son rôle premier ; contrebalancer les inégalités sociales et favoriser l’éducation populaire, et qui ne nécessite aucune compétence commune avec la première.
Le principe du coefficient social appliqué aux « Séjours Vacances », qui permet que ceux-ci bénéficient en priorité aux plus petits salaires, via une contribution progressive en fonction du revenu, constitue un moyen indirect de réduire l’échelle des salaires dans l’Entreprise et nous paraît un très bon principe qu’il faut préserver.
Selon nous, les œuvres sociales doivent se recentrer sur les populations les plus précarisées de la filière de l’énergie. En priorité sur les petits salaires, et donc forcément en ouvrant les droits à tous nos sous-traitants, premiers de corvée (ménage, accueil, sécurité, logistique, documentation, secrétariat…), sans oublier les travailleurs des filiales qui ne bénéficient pas du statut des IEG, et sont souvent victimes de dumping social ! Tous ces salariés devraient légitimement bénéficier du statut des IEG mais dans cette attente, il est inacceptable qu’ils ne bénéficient même pas de la CMCAS (alors même qu’ils contribuent, comme les autres salariés, au chiffre d’affaire de nos entreprises sur lequel est indexé le budget de la CMCAS).
De même, il est normal que la CCAS consacre une partie de son budget à financer des activités culturelles. Nous assumons par exemple de préférer voire subventionner des places de petits théâtres ou cinémas indépendants d’art et essai plutôt que de grands groupes, spectacles à gros budget ou autres parcs d’attraction bénéficiant déjà par ailleurs d’une forte couverture médiatique.
On peut toutefois comprendre la revendication de bénéficier d’une liberté de choix sur l’usage d’une partie de ce « salaire socialisé » dans d’autres Activités Sociales et Culturelles. Une telle possibilité répondrait en particulier au cas des salariés qui ne bénéficient d’aucune aide pour financer leurs vacances, parce qu’ils ne souhaitent pas ou ne peuvent pas, pour des raisons diverses, partir dans le cadre proposé par la CCAS (souhait de partir entre amis hors EDF, dans la famille, avec son animal de compagnie en gite, de choisir des vacances itinérantes, etc.).
Un dispositif type « Chèque vacances » qui fait tant parler de lui depuis plusieurs années, pour peu qu’il soit « socialisé » et qu’il vienne bien en complément et non à la place des offres déjà existantes, devrait pouvoir faire l’objet, sereinement et démocratiquement, d’un débat, d’une consultation, s’il correspond aux attentes des salariés. D’une manière plus générale la consultation du personnel devrait d’ailleurs être une pratique étendue et courante. Façon de faire en sorte que le fameux « par et pour » les bénéficiaires, ne reste pas qu’une promesse électorale.
Pour autant, revendiquer une distribution du montant complet de ce « salaire socialisé » sous forme d’enveloppe individuelle à chaque salarié, comme le font certaines organisations syndicales constitue une orientation totalement contraire à l’objectif de solidarité et d’accès pour tous aux Activités Sociales et Culturelles, objectif qui doit rester la priorité.
Par ailleurs, la transparence doit être garantie sur les comptes et l’utilisation des ressources, ce qui n’est pas le cas actuellement. Par exemple sur certains sites, SUD Energie a demandé à de très nombreuses reprises le détail des coûts de la cantine qui conduit à un prix étonnamment élevé. Certains de nos militants se sont même investis dans des Comités Locaux d’Usagers de cantine, sans jamais parvenir à obtenir d’explication.
Enfin, une attention particulière doit être prêtée aux conditions de travail et aux rémunérations des salariés de la CMCAS, qui sont trop nombreux à avoir des salaires faibles, des CDD et du temps partiel contraint. Le nombre d’arrêts de travail et de procès perdus aux Prud’hommes par l’employeur CMCAS doit également nous alerter, tout comme l’exclusion du corps électoral du personnel convention des activités sociales.
Pour une gestion plus égalitaire des activités sociales
Il nous semble essentiel de conserver cet acquis que représente le financement par les entreprises des activités sociales et de le faire évoluer vers une gestion par les salariés plus coopérative. Comment préserver l’indépendance des syndicats et faire en sorte que le budget alloué aux Activités Sociales ne devienne pas un moyen de pression dans les mains des employeurs ?
Faudrait-il ouvrir les élections à des listes indépendantes des syndicats ?
Quelques pistes que SUD Energie livre au débat, à la réflexion des salariés, pour que puissent émerger, un jour, les œuvres sociales de demain :
- D’abord, se recentrer sur l’éducation populaire, et oublier ce miroir aux alouettes que représente la prédation des budgets de CE par les multinationales de loisirs : utiliser ces moyens pour offrir l’accès à la culture populaire plutôt qu’à la société de consommation ; gérer un bien commun davantage qu’envisager un complément de salaire, que la direction s’empresserait probablement de compenser dans la foulée en limitant les mesures salariales collectives, comme elle l’a déjà fait lorsque les « primes variables » ont fait leur apparition dans l’entreprise.
- Comme toute fonction de représentation d’un collectif (ici les salariés des IEG), la transparence doit être de mise. Les comptes doivent être publics, accessibles à tous, et faire l’objet de débats démocratiques pour permettre aux salariés de réorienter régulièrement les choix collectifs faits en leur nom.
- Construire les œuvres sociales de demain demande un débat avec l’ensemble des salariés, au-delà du syndicalisme. Quels que soient les résultats des élections à venir, SUD Energie demande l’organisation de ce débat pour que puissent émerger massivement ces œuvres sociales réinventées de demain, et pour que leurs contours soient prêts lorsque viendra l’heure de refonder le véritable service public de l’énergie que beaucoup de citoyens attendent.
- Et pour aller encore plus loin, comment étendre cet acquis à tous, salariés des grandes comme des petites entreprises, chômeurs, précaires, artisans, étudiants, etc. ? Comment faire en sorte que l’accès à la culture ou aux vacances deviennent aussi un droit universel ? Ne faudrait-il pas envisager la création d’une caisse interprofessionnelle dédiée aux vacances et aux activités culturelles et sociales, à l’image des caisses « santé » et « retraite », financée par une cotisation sociale dont le taux devrait être imposé aux employeurs – au hasard, 1% du chiffre d’affaires de l’entreprise, gérée par des représentants élus, à différents échelons de proximité. SUD Energie considère que ce débat sur l’accès aux vacances et aux activités culturelles et sociales pour tous doit aussi avoir lieu au niveau interprofessionnel, avec l’ensemble des salariés, dans l’objectif d’une société plus équitable et d’un système encore plus solidaire !
SUD Energie se trouve interdit de participer aux élections CMCAS !
Comme vous l’avez sans doute remarqué, nous ne présentons pas de listes à ces élections. La raison en est simple : la Direction et les autres Organisations Syndicales nous l’interdisent.
En effet, l’accord électoral signé par les organisations syndicales « représentatives » de la branche permet le rejet des listes SUD Energie (tous les projets d’accord précédents comportaient cette même interdiction), puisqu’il faut avoir obtenu au moins 10% des voix aux élections CSE à la maille nationale pour pouvoir présenter une liste valide aux élections des conseils d’administration des CMCAS. Cette exclusion discriminatoire fait des IEG une exception notoire, puisque dans le droit commun, les activités sociales sont gérées par le Comité Social et Economique, pour lequel toutes les organisations syndicales constituées peuvent se porter candidates, conformément à la loi de 2008.
Si comme nous :
- Vous regrettez le manque de transparence actuel sur les comptes et l’utilisation des ressources de votre CE, « le plus riche de France »,
- Vous refusez la conception individualiste des propositions de certaines organisations syndicales,
- Vous estimez que les Organisations Syndicales Non Représentatives, ou les salariés sans étiquette syndicale devraient pouvoir présenter valablement des listes de candidats aux élections des conseils d’administration des CMCAS,
Alors ne perdez pas le nord : rejoignez SUD Energie !
[1] La subvention allouée pour les activités sociales et culturelles est déterminée par accord d’entreprise. En l’absence d’accord d’entreprise, le Code du travail n’impose qu’une no régression par rapport à l’année précédente.
[2] Somme forfaitaire des entreprises + un complément dépendant de leur chiffre d’affaires
[3] Une décision du tribunal correctionnel de juin 2014, au terme d’une enquête démarrée en 2004, en pleine bagarre contre la privatisation d’EDF, s’est soldée par la condamnation de huit personnes physiques (dont un ancien président et un ancien directeur général) et quatre personnes morales pour abus de confiance, de complicité ou de recel. Les condamnations s’étendent entre des peines de 2 mois à 18 mois avec sursis et des amendes de 4 000 à 75 000 €.
Pour aller un peu plus loin, voici quelques liens utiles :